Pays du bouddhisme Russie

 

KSÉNIA PIMENOVA

Docteur en anthropologie, Ksenia Pimenova est chargée de recherche FNRS à l’ULB (Université Libre de Bruxelles) et membre du laboratoire GSRL (EPHE-CNRS).

 

La thèse en sociologie, que j’ai écrite sous la direction de Danièle Hervieu-Léger et soutenue à l’École des hautes études en sciences sociales (Paris) le 13 septembre 2012 , s’intéresse aux aspects institutionnels, identitaires et rituels du renouveau post-soviétique du chamanisme et du bouddhisme chez les Touvas de la Sibérie du Sud. L’interrogation transversale de ce travail porte sur le concept de savoirs religieux. La thèse étudie les modes de transmission de ces savoirs avant et pendant la période soviétique, leur usage par les acteurs du renouveau post-soviétique et leur gestion au sein de nouvelles organisations religieuses de bouddhistes et de chamanes. Elle tient compte des traditions préexistantes dans l’étude du bouddhisme et du chamanisme, en particulier des travaux de l’ethnographie soviétique, et elle combine les approches théoriques et méthodologiques de l’anthropologie et de la sociologie des religions.

Ce travail est fondé sur des matériaux collectés au cours de quatre enquêtes de terrain, d’une durée totale de plus de six mois, entre 2002 et 2009 menées dans les différentes provinces de Touva, et en particulier dans sa capitale Kyzyl qui concentre aujourd’hui la plupart des organisations religieuses de bouddhistes et de chamanes. Ces matériaux comprennent des données provenant de l’observation ainsi que des entretiens non-directifs approfondis réalisés avec des interlocuteurs aux statuts différents (chamanes de différents niveaux hiérarchiques et leurs clients ; clercs et laïcs bouddhistes ; fonctionnaires et intellectuels). La thèse s’appuie également sur des matériaux russophones de seconde main, relativement peu connus en France, provenant de sources du XIX e et du XX e siècle (pour les parties historiques), ainsi que sur des articles récents publiés dans les médias touvas, des textes de lois post-soviétiques sur la religion, ou encore des rapports officiels du gouvernement touva.

La thèse comprend trois volumes, chacun composé de deux parties, ainsi qu’une bibliographie et des annexes. Elle est accompagnée de la liste des informateurs, de celle des acronymes et du glossaire de termes touvas. Les annexes comprennent une sélection de légendes et de récits oraux enregistrés auprès des profanes, un schéma généalogique d’une chamane, le texte de l’invocation rituelle, ainsi que deux projets vidéo (« Le cabinet des esprits » – 27 minutes – et « Vera Sazhina, portrait d’une chamane » – 10 minutes –, filmé à Touva et projeté lors de l’exposition « Les Maîtres du désordre » au musée du Quai Branly en 2012).

Avant d’exposer l’argumentaire et le contenu des différentes parties, il convient de rappeler quelques éléments de l’histoire et de l’ethnographie des Touvas. 

Histoire et ethnographie des Touvas

Cette population autochtone vit essentiellement dans la République de Touva située dans la région de l’Altaï-Saïan dans la Sibérie méridionale ; elle compte aujourd’hui environ 250 000 personnes (voir note 2) . En raison des particularités de leur parcours historique, les Touvas occupent aujourd’hui une place à part parmi les populations sibériennes.

Du point de vue linguistique et culturel, ils sont proches d’autres populations turcophones de la région Altaï-Saïan. Par le passé, ils ont partagé avec leurs voisins les plus proches, les Khakasses et les Altaïens, les traits essentiels de leur économie, fondée sur l’élevage et la chasse, ainsi que de nombreux éléments de leur culture chamanique.

Cependant, à partir de la deuxième moitié du XVIII e siècle et jusqu’au début du XX e, le territoire touva a fait partie de l’empire mandchou des Qing. C’est par l’intermédiaire des Mongols, à l’époque également sujets des Qing, que les Touvas ont connu le bouddhisme tibétain de l’école Guélougpa (dite aussi « École des bonnets jaunes ») et qu’ils ont intégré le monde multiethnique du bouddhisme dont les centres se situaient en Mongolie et au Tibet.

La conversion des Touvas à la religion du Bouddha, très inégale du point de vue géographique, n’a pas pour autant abouti à la disparition du chamanisme. Elle a en revanche conduit à l’émergence d’une culture mixte, marquée par la coprésence de spécialistes de rituels différents et la coexistence de rituels « nouveaux » (bouddhiques) et « anciens » (chamaniques).

Enfin, après la chute de l’empire Qing en 1911, le pays touva s’est peu à peu retrouvé sous l’influence politique de la Russie tsariste, puis soviétique. Pendant la courte période d’indépendance du pays, baptisé alors République populaire de Touva (1921-1944), les autorités pro-communistes ont lancé les premières purges contre les représentants des « classes exploiteuses », notamment les riches éleveurs et le clergé bouddhiste. Au moment de l’annexion du pays par l’ URSS en 1944, tous les monastères et temples bouddhiques avaient déjà été démolis ; les lamas qui étaient encore en vie s’étaient réfugiés dans la clandestinité. Dans la Touva soviétique de l’après-guerre, les répressions ont cédé la place à la propagande antireligieuse contre le bouddhisme et contre le chamanisme, perçu comme « une survivance » du passé dont il fallait se débarrasser.

Au-delà de ces politiques visant les phénomènes religieux, les Touvas ont vécu à partir des années 1930 les grandes campagnes de réformes qui ont sensiblement réduit les espaces sociaux dans lesquels se pratiquaient auparavant les rites bouddhiques et chamaniques. La sédentarisation des nomades, la création de fermes collectives d’État, l’apparition de villages et de villes, l’introduction de la médecine d’après le modèle soviétique ainsi que l’éducation scolaire athée ont profondément transformé la société touva.

Au milieu des années 1990 la moitié des Touvas vivait en milieu urbain et pratiquait des métiers qui n’avaient plus aucun rapport avec le mode de vie de leurs ancêtres. La chute de l’URSS a cependant fragilisé les acquis économiques de la période précédente et ouvert un espace de grande incertitude économique et sociale : aujourd’hui encore Touva compte parmi les régions les plus pauvres de la Russie en terme de revenus par habitant, et affiche un des taux de chômage les plus élevés, oscillant autour de 20 % entre 1995 et 2010, soit presque trois fois plus que la moyenne russe (voir note 3).

 

Le problème de continuité dans la transmission de savoirs rituels et de leur reconstruction post-soviétique

Le renouveau religieux commence au tout début des années 1990 après des décennies de politiques soviétiques qui ont conduit à la marginalisation du chamanisme, à la disparition presque totale du clergé bouddhique et à la destruction de l’héritage culturel de la religion du Bouddha. C’est à ce moment que des groupes d’enthousiastes, souvent formés par des intellectuels citadins, fondent les premières organisations de bouddhistes qui rassemblent clercs (touvas, mais surtout mongols) et croyants laïcs. À la même période, apparaissent aussi les premières « organisations religieuses de chamanes » regroupant jusqu’à plusieurs dizaines d’individus qui pratiquent les divinations et les rituels thérapeutiques pour leurs clients.

La création des organisations religieuses de chamanes et de bouddhistes s’accompagne de l’émergence d’un discours réflexif sur le rapport à la tradition, qui revendique la continuité avec le passé. Le bouddhisme et le chamanisme se positionnent et sont d’ailleurs perçus par les autorités et la population comme des phénomènes religieux « traditionnels » qui auraient été préservés no-nobstant les politiques antireligieuses. Or cette aspiration à la continuité s’avère, à plusieurs égards, compliquée. Dans le cas du bouddhisme, l’enjeu central du renouveau est de trouver le moyen de reconstruire des lignées de transmission valides, c’est-à-dire censées remonter jusqu’au Bouddha, concernant les savoirs philosophiques et rituels. Cette exigence se heurte à une difficulté objective, car il ne reste plus aucun lama touva de la génération précédente capable de former les jeunes disciples touvas. D’où la nécessité d’importer ces savoirs de l’extérieur, et notamment de la diaspora tibétaine en Inde, de la Mongolie et de la République de Bouriatie voisine.

Quant aux chamanes contemporains, il s’agit pour eux de trouver les sources d’inspiration pour réélaborer les rites qui seraient en conformité avec ce qui est connu du chamanisme touva dans le passé, par le biais des sources écrites et des mémoires familiales. Or aucun de ces chamanes, sauf rare exception, n’a été, dans son enfance ou sa jeunesse, directement en contact avec les chamanes âgés, même si la plupart d’entre eux affirment avoir eu des chamanes parmi leur ascendance. En outre, il est nécessaire d’adapter ces rites aux besoins d’une population urbaine qui n’ont plus rien à voir avec ceux des populations nomades pré-soviétiques de chasseurs et d’éleveurs.

L’acception du terme « savoirs », empruntée à F. Barth, est ici volontairement large. Les savoirs sont « ce qu’un individu utilise pour interpréter le monde et agir sur lui […] tant les sentiments (les attitudes) que l’information, tant le savoir-faire incorporé que les taxonomies verbales et les concepts » (voir note 4). Selon Barth, les savoirs existent sous des formes différentes. Parfois ils sont « dérivés de quelques principes abstraits par le biais d’une déduction systématique », codifiés et organisés. Mais le plus souvent ils existent « comme un assemblage de détails empiriques déconnectés » (voir note 5).

Cette acception large permet de rendre compte des modes spécifiques de distribution sociale et de transmission intergénérationnelle de savoirs bouddhiques et chamaniques, et de mieux comprendre leurs continuités et leurs superpositions historiques et contemporaines à Touva. D’un côté, il y a les savoirs rituels et cosmologiques du bouddhisme qui se transmettent dans le cadre d’un parcours de formation long, tenu au sein des monastères, contrôlé par l’autorité religieuse. Ces savoirs existent souvent sous forme de corpus complexes qui ne sont accessibles dans leur intégralité aux disciples que si ces derniers obtiennent de leurs précepteurs et de leurs maîtres spirituels les initiations et les autorisations requises. La transmission de ces savoirs dépend ainsi du bon fonctionnement des institutions religieuses organisées. De l’autre côté, il y a les savoirs du chamanisme censés être directement « inspirés » ou « dictés » par les esprits auxiliaires du chamane. L’acquisition de ces savoirs (tant des savoirs cosmologiques que du savoir-faire rituel) relève de l’assemblage d’informations diverses, variables d’un chamane à l’autre. Celles-ci proviennent de multiples sources qui ne sont pas nécessairement nommées comme telles, mais qui sont toutefois inscrites dans le parcours social du chamane. Dans le passé, il s’agissait de la communauté dont le chamane faisait partie, de ses parents et de son entourage proche. Dans la période contemporaine, ces sources anciennes continuent à inspirer les chamanes, mais de nouvelles sources sont aussi mobilisées.

Parmi celles-ci, les travaux ethnographiques sur les Touvas, écrits notamment pendant la période soviétique, occupent une place importante ; ils préservent les savoirs sur le chamanisme du passé sous une forme fixe. On observe également une intensification des emprunts au bouddhisme, car certains chamanes se disent bouddhistes pratiquants. Enfin, des idées et des pratiques rituelles nouvelles apparaissent dans le chamanisme touva contemporain grâce aux contacts que celui-ci développe dans les années 1990 avec des réseaux néo-chamaniques internationaux et des milieux russophones relevant de la « nébuleuse mystique ésotérique” (voir note 6) .

Le projet de la thèse a consisté à étudier, selon des points de vue diachronique, synchronique et comparatiste, les mécanismes de transmission de savoirs propres au bouddhisme et au chamanisme.

Comment, et dans quelle mesure, ces savoirs ont-ils pu être préservés (ou non) pendant la période soviétique ? Comment la nouvelle génération de bouddhistes et de chamanes post-soviétiques cherche-t-elle à restituer au moins une partie de ces savoirs anciens, nonobstant les ruptures et les transformations de la période soviétique ? Ces questions sont directement liées à la construction de l’autorité religieuse pendant la période post-soviétique.

L’émergence de l’autorité dans le bouddhisme et dans le chamanisme s’accompagne en effet de conflits qui ont très souvent comme cause le contrôle sur la validité des savoirs et des lignées de transmission.

 

La distribution sociale de savoirs rituels dans l’ancienne Touva et l’impact de politiques antireligieuses soviétiques

Le premier volume de la thèse, fondé essentiellement sur des sources historiques du XIX e siècle et du XX e, s’intéresse à la structure des savoirs dans l’ancienne Touva (Partie I) et à la survie du chamanisme et du bouddhisme dans la période soviétique (Partie II). À travers la présentation de différentes figures de spécialistes rituels, sont analysés les domaines de compétence rituelle et les différents modes de transmission des savoirs. Comme il a été attesté pour d’autres populations de la Sibérie et de l’Asie Intérieure, il existait dans ces sociétés de nombreux spécialistes autres que les chamanes, chargés de soigner certaines maladies, faire les divinations, prédire l’avenir (voir note 7) . Les compétences rituelles étaient ainsi partagées largement entre différents membres de ces sociétés, y compris entre les profanes. D’une manière similaire, dans la Touva du XIX e siècle, la « distribution sociale des savoirs » cosmologiques et rituels (pour reprendre le terme de F. Barth) pouvait être qualifiée de totale dans la mesure où elle incluait les chamanes, les profanes, les « chamanisants » (guérisseurs, devins) et les lamas. Elle était aussi redondante, certaines compétences étant partagées entre plusieurs spécialistes (par exemple, la divination pouvait être conduite par les chamanes et par les profanes). Même si les chamanes revendiquaient une puissance magique extraordinaire et une différence substantielle avec les profanes, les savoirs qu’ils mobilisaient dans leurs rituels leur étaient transmis précisément par l’intermédiaire de leur communauté profane et par des spécialistes rituels autres que les chamanes. Ces savoirs cosmologiques et rituels partagés, circulant dans la société, « palliaient » la durée très courte, presque éphémère, de formation d’un jeune chamane par un autre, plus expérimenté. Par contraste avec le chamanisme, le bouddhisme guélougpa s’appuyait sur des corpus complexes de savoirs spécifiques (par exemple, la médecine tibétaine et l’astrologie) dont la transmission nécessitait un parcours long sous la surveillance de maîtres et de précepteurs (voir note 8) .

Or ces configurations de savoirs distinctes quant à leur nature et leurs modes de transmission ont eu un rôle non négligeable dans les destinées respectives du bouddhisme et du chamanisme touvas au XX e siècle (Partie II). En ce qui concerne le bouddhisme, dès les années 1930, le contexte politique lui a été particulièrement défavorable. Les nouveaux leaders pro-communistes de la République populaire de Touva formés en URSS craignaient la rivalité du clergé bouddhique pour le contrôle du pouvoir. De nombreux lamas ont alors été fusillés, emprisonnés, forcés à l’exil ou à la clandestinité.

Après l’annexion de Touva par l’ URSS en 1944, les pressions sur les clercs et les croyants, ainsi que le statut semi-clandestin imposé par les autorités, ont rendu impossible la formation religieuse et les rassemblements collectifs. Ainsi, les politiques anti religieuses ont conduit à la rupture des liens entre les générations de clercs et laïcs bouddhistes, et au dépérissement puis à la disparition du Sangha (communauté de moines), un des « joyaux » symboliques de chaque croyant.

L’impact de ces politiques sur le chamanisme a été en revanche plus limité, et pour plusieurs raisons. D’un côté, les autorités ne voyaient pas dans les chamanes une force aussi organisée et dangereuse que le clergé, et les traitaient d’une manière plus laxiste. Ainsi, à partir des années 1950, les ethnographes soviétiques ont trouvé des chamanes en activité dans les villages de la Touva soviétique (voir note 9) .

D’autre part, une partie des savoirs sur le chamanisme a subsisté grâce aux particularités de leur distribution sociale. Les récits sur les chamanes ancêtres ont continué à exister grâce aux mémoires familiales. Le savoir-faire rituel s’est préservé à travers la pratique rituelle des « chamanisants » et les gestes rituels simples des profanes, telles les fumigations thérapeutiques ou les aspersions du lait, destinées à vénérer les esprits-maîtres des lieux. De plus, le développement des études ethnographiques sur les Touvas dans la seconde moitié du XX e siècle a fourni des supports écrits aux savoirs cosmologiques et rituels jusque-là uniquement oraux, et les a fixés à jamais sur le papier. Dans les années 1990 cette ethnographie sera notamment utilisée comme un « point de référence fixe “(voir note 10)  par les nouveaux chamanes post-soviétiques.


La reconstruction de savoirs rituels dans le renouveau du chamanisme et du bouddhisme pendant la période post-soviétique

Les deuxième et troisième volumes de la thèse sont consacrés à la période post-soviétique, de la chute de l’URSS en 1991 jusqu’à 2009, année de la dernière enquête. L’analyse se développe à deux niveaux complémentaires. Le premier niveau (vol. II) porte sur la sociologie des organisations religieuses dans leurs interactions avec l’État et les partenaires religieux étrangers. Le second niveau d’analyse (vol. III) est centré sur une sociologie des identités et des pratiques rituelles.


Aspects organisationnels

Les deux parties du deuxième volume traitent respectivement du développement des organisations religieuses de chamanes et de celui des organisations bouddhistes (Partie IV) dans le contexte post-soviétique. Le renouveau tant chamane que bouddhiste est structuré par les relations d’entraide et d’instrumentalisation réciproques avec, d’un côté, les milieux politiques locaux et, de l’autre, les réseaux religieux et spirituels globalisés. Mais ces relations avec l’État et avec les partenaires étrangers n’ont pas eu les mêmes conséquences sur l’évolution du chamanisme et du bouddhisme à Touva.

L’État est, de manière générale, le premier partenaire des organisations religieuses touvas, ce qui s’inscrit dans une tendance plus large qui englobe d’autres phénomènes religieux, dans d’autres régions de la Russie. En effet, depuis environ le milieu des années 1990 les relations entre l’État et le religieux sont fortement influencées par l’idée d’un « consensus pro-traditionnel », selon laquelle les religions historiques auraient un « droit » privilégié sur leurs communautés ethniques (voir note 11) . En 1995, la loi de la République de Touva « Sur la liberté de conscience et les organisations religieuses » a reconnu le bouddhisme et le chamanisme comme « confessions traditionnelles » (voir note 12) , ce qui a permis à leurs représentants de prétendre au soutien symbolique des autorités et à diverses aides matérielles. Celles-ci restent néanmoins soumises aux aléas de l’instrumentalisation réciproque entre le religieux et les milieux politiques qui favorisent certains projets au détriment d’autres.

C’est pour cette raison que les grands événements du bouddhisme ayant une dimension symbolique et une portée médiatique particulièrement fortes sont soutenus au plus haut niveau gouvernemental, comme cela a été le cas pour l’unique visite du XIV e dalaï-lama Tenzin Gyatso à Touva en 1992. D’autres projets de moindre envergure, tels que l’attribution de locaux aux sociétés chamaniques ou la construction de certains temples bouddhiques, se réalisent à l’initiative personnelle de politiciens pour des raisons essentiellement électorales. D’autres projets encore, peu intéressants pour les élites politiques locales ou trop coûteux, restent à l’abandon. C’est le cas de la traduction de textes bouddhiques en touva, et de la restauration du monastère Üstüü-Xüree, le plus grand édifice bouddhique en pierre construit au début du XX e siècle et démoli trois décennies plus tard.

En plus de ses aides, l’État a une influence autrement plus importante sur les aspects organisationnels et institutionnels du chamanisme post-soviétique touva. Depuis le début des années 1990 la plupart des chamanes travaillent en effet dans des « sociétés chamaniques », ou organisations religieuses de chamanes, qui doivent être enregistrées officiellement auprès du ministère de la Justice. Or la notion d’organisation religieuse fait partie du vocabulaire politique et juridique de l’État depuis la période soviétique et a été introduite pour contrôler l’activité des représentants des grandes religions. Elle est donc complètement étrangère au chamanisme touva et à son organisation sociale telle qu’elle existait dans le passé. Son utilisation dans le contexte chamanique actuel entraîne toute une série de conséquences en cascade tant au niveau de son organisation qu’à celui de son fonctionnement. Il s’agit d’abord de l’émergence même du champ du chamanisme (dans le sens de Pierre Bourdieu) dont les étapes essentielles sont retracées dans la thèse. Ce champ est caractérisé par une hiérarchisation inédite que n’a jamais connue le chamanisme par le passé. Par exemple, on peut distinguer aujourd’hui les chamanes « ordinaires » et les directeurs d’organisations religieuses. Ces derniers bénéficient d’une plus grande visibilité à Touva et à l’étranger. Ils reçoivent les clients, mais se chargent aussi des tâches administratives et financières et ont un pouvoir d’influence sur leurs chamanes subordonnés. Au sommet de cette hiérarchie se trouve le « Président à vie de tous les chamanes touvas ». Ce poste est occupé depuis le début des années 1990 par Mongush Kenin-Lopsan, écrivain, ethnographe, expert local du chamanisme et premier promoteur de son renouveau post-soviétique, qui a réussi à combiner avec succès son capital académique avec le pouvoir de décision dans toutes les affaires concernant le chamanisme touva.

La hiérarchisation du chamanisme a eu pour conséquence l’introduction de règles de travail et des tentatives de « normaliser » les pratiques rituelles par le haut, y compris avec l’appui de sources ethnographiques et notamment des travaux de M. Kenin-Lopsan.

Mais ces tentatives d’introduire des règles normatives, entreprises par les directeurs des sociétés chamaniques, se sont heurtées aux particularités de la personnalité et du travail rituel des chamanes.

Comme par le passé, ces derniers doivent apparaître à leurs clients comme des spécialistes rituels dotés de capacités extraordinaires et uniques. C’est la singularité du chamane, sa distinction avec les autres, qui fait sa force et qui attire les clients. Il en résulte que le chamanisme touva évolue aujourd’hui dans un équilibre précaire et sans cesse renégocié entre, d’une part, les nouvelles contraintes institutionnelles et économiques imposées par les organisations religieuses et, d’autre part, le caractère personnalisé des rites et des relations avec les clients qui distinguent la pratique chamanique en tant que métier du sacré. Ainsi, si de nombreux chamanes finissent par devenir « indépendants » et rompent avec leurs organisations, celles-ci continuent à se développer, car elles attirent les chamanes débutants en leur donnant l’accès à une clientèle régulière et donc à des revenus plus stables.

À côté de l’État et des autorités politiques, les réseaux religieux et spirituels étrangers constituent le deuxième partenaire clé des organisations de bouddhistes et de chamanes. Le renouveau du chamanisme et du bouddhisme est en effet profondément marqué par la globalisation du religieux, comprise comme « l’intensification des dépendances réciproques, des échanges entre des foyers dispersés de production, circulation et consommation de biens matériels et immatériels » (voir note 13).

La dépendance envers les réseaux religieux globalisés est particulièrement visible dans le cas du bouddhisme touva, car les échanges avec l’étranger constituent la condition même de son développement. En effet, en raison de la rupture des lignées de transmission locales pendant la période soviétique, le recours à l’aide de partenaires extérieurs pour former ex nihilo une nouvelle génération de clercs est tout simplement indispensable. Qu’il s’agisse de la formation, mais aussi de l’organisation de rituels et de conférences pour les laïcs, quasiment tout projet inhérent au renouveau bouddhique suppose la réimportation de savoirs religieux de l’extérieur de Touva. Les principaux partenaires dans ces échanges de « savoirs » sont les monastères relativement proches de Bouriatie et Mongolie, et surtout les collèges monastiques tibétains en Inde. Depuis la visite à Touva du XIV e Dalaï-Lama Tenzin Gyatso en 1992, certains de ces collèges participent aux accords d’échange et de coopération signés avec le gouvernement touva.

Ces accords prévoient l’accueil de jeunes disciples touvas en Inde pour des cursus de formation de plusieurs années et, inversement, l’envoi à Touva de quelques moines tibétains chargés d’organiser la formation de novices sur place.

Toutefois, ces accords ambitieux n’ont pas pu se réaliser dans leur intégralité. En effet, bien qu’indispensable, l’intensification des relations transnationales a aussi paradoxalement abouti à la déstabilisation de l’autorité religieuse locale en train de se construire. Au cours des années 1990, deux points de vue sur le développement futur du bouddhisme et sur ses rapports avec l’extérieur ont existé.

Le premier, défini dans la thèse comme « transnationaliste », interprétait les relations avec les partenaires étrangers (et surtout tibétains) comme l’unique moyen de reconstruire les lignées de transmission valides. Selon les partisans de ce point de vue, particulièrement nombreux parmi les organisations bouddhiques laïques, Touva gagnait à assumer sa position de « pays disciple » de la communauté tibétaine en exil. Mais la grande partie de clercs touvas partageaient explicitement ou implicitement un autre point de vue, « autonomiste ». Tout en reconnaissant l’autorité symbolique des hiérarques tibétains, ils chérissaient l’utopie d’un retour possible aux traditions locales du bouddhisme et percevaient la présence de moines tibétains sur place comme une ingérence dans les affaires intérieures du Sangha touva encore trop fragile. La confrontation de ces deux points de vue a atteint son apogée lors du conflit dans le temple central de Kyzyl au tournant des années 1990 et 2000, et a abouti à l’éclatement de l’ensemble de la communauté bouddhiste.

La querelle opposant les représentants autonomistes du clergé touva, d’un côté, et les transnationalistes (laïcs et clercs pro-tibétains), de l’autre, a duré jusqu’en 2004-2005 et a significativement ralenti le renouveau du bouddhisme. Elle a rendu visible une fracture profonde, constitutive du bouddhisme post-soviétique touva, qui lui confère le caractère d’un phénomène religieux à deux vitesses. D’une part, il y a la religiosité « populaire » qui s’exerce dans les temples dont les gérants soutiennent le point de vue autonomiste. Elle renvoie à des pratiques rituelles à visée intramondaine, comme les purifications ou les réparations de situation astrologique de l’individu. D’autre part, il y a les groupes de bouddhistes intellectuels laïcs, partisans de la perspective transnationaliste. Soutenus par les clercs transnationalistes, ces groupes sont minoritaires mais puissants. Leurs membres étudient les pratiques tantriques extra mondaines et sont très actifs dans les projets de propagande de l’enseignement du Bouddha auprès de la population. Les bouddhistes laïcs membres de ces groupes possèdent en plus une connaissance avancée de la philosophie bouddhique qui fait défaut à la plupart des clercs autonomistes. Cette « distribution inversée » des savoirs a d’ailleurs été une des causes du conflit d’autorité entre les deux groupes.

En ce qui concerne le chamanisme, il s’est reconstitué, lui aussi, dans le contexte de la globalisation du religieux. La première organisation chamanique Düngür (« Tambour ») a été créée en 1993, entre autres raisons pour accueillir à Kyzyl une conférence américano-touva sur le chamanisme, co-organisée par les membres de la Foundation for Shamanic Studies (FSS ). Cette organisation internationale, créée aux États-Unis dans les années 1970, compte parmi ses objectifs « la préservation, l’étude et l’enseignement du savoir chamanique pour le bien-être de la planète et de ses habitants » (voir note 14). Au début des années 1990, les représentants de la FSS – anthropologues, journalistes et psychologues pratiquant eux-mêmes les techniques chamaniques – voyaient dans Touva une terre de tradition chamanique ancienne, totalement inconnue, qui s’ouvrait enfin au monde après les décennies soviétiques. Du côté touva, le contact principal de la FSS était Mongush Kenin-Lopsan. Pour les chamanes qu’il « recrutait » dans sa première organisation Düngür, les relations avec les néo-chamanes occidentaux de la FSS étaient porteuses de ressources précieuses, telles que la visibilité auprès de nouveaux clients, des revenus et des informations utiles. C’est ainsi que depuis le début des années 1990 et jusqu’à maintenant les Touvas  ont cultivé  et  multiplié les contacts avec les réseaux néo-chamaniques en Europe et aux États-Unis. Ils les ont ensuite élargis aux grandes villes de la Russie où les représentants de divers centres ésotériques proposent à leur public des séminaires payants, animés notamment par des chamanes touvas.

Mais contrairement au cas du bouddhisme touva qui occupe une place modeste dans les réseaux religieux globalisés, les chamanes ont réussi à s’imposer face à leurs interlocuteurs locaux et étrangers comme les porteurs de savoirs rituels anciens et authentiques. Leurs relations avec les réseaux néo-chamaniques et ésotériques relèvent d’un partenariat entre égaux et n’ont pas de dimension hiérarchique, contrairement aux rapports entre les bouddhistes touvas et le clergé tibétain. À cet égard, la comparaison entre le chamanisme et le bouddhisme touvas fait apparaître deux scénarios de la globalisation religieuse. Les contrastes entre ces deux scénarios non seulement s’expliquent par les conceptions différentes de l’autorité dans le bouddhisme et le chamanisme, mais découlent aussi de leurs particularités respectives quant à la préservation, la transmission et la gestion des savoirs. Ainsi les chamanes post-soviétiques touvas trouvent un appui dans des sources locales de savoirs cosmologiques et rituels et ne dépendent de leurs partenaires étrangers que pour mieux exporter leurs compétences. En revanche, la reconstruction de savoirs rituels dans le bouddhisme passe par leur réimportation et demande des efforts collectifs importants afin de maintenir des échanges durables entre Touva et l’étranger.


Aspects identitaires et rituels

Le volume III, consacré à la sociologie des identités et des pratiques rituelles, continue la réflexion sur la notion de savoirs à partir d’un point de vue microsociologique et ethnographique. Nous avons cherché à comprendre comment les individus construisaient leur identité de spécialistes rituels et comment ils élaboraient les pratiques qui seraient à la fois en conformité avec leurs propres représentations de la tradition et avec le nouveau contexte social et économique de la période post-soviétique. Si les matériaux sur le bouddhisme sont présents en toile de fond, ce volume accorde plus d’attention au chamanisme dans lequel le principe de singularité du spécialiste rituel et, par conséquent, les enjeux de construction de son identité se manifestent d’une manière particulièrement saillante.

La partie V étudie les récits de vie de chamanes post-soviétiques, particulièrement importants dans la construction de leurs « identités narratives» (voir note 15). C’est en se racontant que les chamanes se constituent en tant que spécialistes rituels uniques, dotés de capacités magiques. Ces capacités sont le plus souvent censées être innées et transmises dans la famille depuis les chamanes ancêtres (figures mythiques ou réelles dans l’ascendance directe ou latérale) vers leurs héritiers contemporains. Les récits distinguent les chamanes des profanes, mais aussi d’autres collègues chamanes, et sont donc le moyen d’affirmer leur statut de spécialiste et leur singularité.

Les récits de vie représentent un « genre de discours »(voir note 16) particulier. D’un côté, ils s’appuient sur une trame autobiographique qui retrace les étapes de la socialisation dans la Touva soviétique : le parcours scolaire, les examens universitaires, l’armée. De l’autre, ils contiennent de nombreux éléments qui pourraient être qualifiés de fantastiques, tels que les rencontres avec les esprits, les visions des chamanes ancêtres défunts ou les épisodes de voyance et de prédiction. Au-delà des références aux esprits et aux autres phénomènes fantastiques, les récits de vie permettent d’étudier les sources sociologiques des savoirs rituels utilisées par les chamanes post soviétiques. Ces récits se nourrissent notamment des généalogies familiales et des mémoires sur les chamanes ancêtres et les grands chamanes mythiques du passé. Ils s’inspirent aussi de la tradition orale qui continue toujours à véhiculer dans les milieux profanes les récits sur les rencontres fortuites avec divers esprits nuisibles (azalar, buktar, etkerler), une des causes principales des infortunes et des maladies dans le discours explicatif chamanique.

Tout comme les récits, les pratiques rituelles analysées dans la partie VI constituent une revendication de la continuité avec le passé. Les chamanes investissent dans leurs rituels – dont chacun est singulier et ne ressemble aux autres que dans ses traits essentiels – des savoir-faire d’origines différentes. De nouveau, il peut s’agir de mémoires familiales, de la tradition orale, ainsi que la ritualité profane de la période soviétique. Mais les chamanes d’aujourd’hui trouvent également leur inspiration dans les travaux ethnographiques et les thérapies « mystiques ésotériques », devenues populaires partout en Russie au début des années 1990. L’analyse de ces matériaux à la lumière d’éléments biographiques et identitaires permet de mieux comprendre les élaborations rituelles des chamanes post-soviétiques comme un processus personnalisé et créatif.

La comparaison systématique entre les rituels de chamanes et de lamas menée dans la partie VI révèle aussi le rôle important des savoirs d’origine bouddhique dans les rituels contemporains du chamanisme. Si les interactions séculaires du bouddhisme avec les cultes locaux sont un phénomène historique bien connu dans différentes régions de l’Asie intérieure, elles prennent aujourd’hui un nouveau tournant. Les emprunts deviennent plus systématiques et concernent certains domaines de savoirs dans leur intégralité, comme l’astrologie, un savoir d’origine bouddhique d’une grande complexité. Les chamanes proposent désormais à leurs clients des versions simplifiées de rites bouddhiques analogues à ceux conduits par les lamas dans les temples. Ces emprunts au bouddhisme enrichissent les rituels de chamanes et contribuent à renforcer leurs positions dans la compétition latente avec les lamas.

 

Conclusion

Le bouddhisme et le chamanisme, deux traditions de savoirs religieux que les Touvas ont connues dans le passé, se reconstituent aujourd’hui dans un monde en transformation. Leurs capacités de se reconstruire sont définies en grande partie par les modes de transmission de savoirs qui leur sont propres. D’une part, les acteurs du renouveau bouddhique peuvent tirer partie du caractère transnational de cette religion pour réimporter les savoirs religieux sur le sol touva et recréer les lignées légitimes. D’autre part, la souplesse des rapports du chamanisme avec ses nombreuses sources de savoirs permet aujourd’hui aux chamanes d’enrichir leurs pratiques rituelles de divers emprunts et de revendiquer la continuité avec le passé même lorsqu’il n’est plus question de transmissions directes.

Ce travail d’importation, d’adaptation et de reconstruction de savoirs ne s’est pas fait, cependant, sans conflits, divisions et contradictions internes. Ceux-ci ont fortement marqué l’histoire du bouddhisme et du chamanisme à Touva depuis les années 1990.

Les Touvas eux-mêmes portent souvent un regard critique sur le renouveau contemporain à cause de son caractère « anti-traditionnel » (qu’on reproche par exemple aux organisations de chamanes) et de son déficit de compétences (critique qui concerne notamment une partie du clergé bouddhique touva). Mais ces difficultés témoignent du processus d’ajustements des phénomènes religieux avec le contexte légal, national et global, et donc en définitive de la viabilité et de la vitalité de leur renouveau contemporain.

École des hautes études en sciences sociales, Paris

 

NOTES 

  1. Avec un jury composé de M. Erwan Dianteill, de Mme Roberte Hamayon, de M. Raphaël Liogier, de Mme Danièle Hervieu-Léger et de Mme Kathy Rousselet.

 

  1. Pour les données sur la population vivant sur le territoire de la république de Touva, voir « Skol’ko nas i kakix v Tuve: to pokazala perepis’ » [Qui et combien nous sommes à Touva : les résultats du recensement], Centre Azii, 7, 2012. Pour les données sur l’ensemble des Touvas vivant en Russie, voir Okonatel’nyje Itogi vserossijskoj perepisi naselenija 2010 goda [Résultats définitifs du recensement de la population de la Russie de 2010], fichier « Nacional’nyjsostav naselenija Rossijskoj Federacii » [Composition ethnique de la population de la Russie]. Publié en ligne en 2012 : http://www.perepis- 2010.ru/results_of_the_census/results-inform.php.-

 

  1. Pour les données détaillées par année et par région, voir les matériaux du Service fédéral de la veille statistique d’État : Rossijskij statistieskij Ežegodnik [Annuaire statistique de la Russie], Federal’naja služba gosudarstvennoj statistiki, 2011. Ces données sont également disponibles en ligne sur www.gks.ru.

 

  1. Fredrik Barth, « The Anthropology of Knowledge », Current Anthropology, 43 (1-18), 2002, p. 1.

 

  1. Ibid., p. 8.

 

  1. Françoise Champion, « La “nébuleuse mystique-ésotérique” : une décomposition du religieux entre humanisme revisité, magique, psychologique », in F. Laplantine (éd.), Le Défi magique. Ésotérisme, occultisme, spiritisme, Lyon, PUL, 1994, vol. 1, p. 315-326.

 

  1. Dmitrij Funk, Miry šamanov i skazitelej. Kompleksnoe issledovanie teleutskix i šorskix materialov [Les Mondes des chamanes et des conteurs. Une étude comparative des matériaux chors et téléoutes], M., Nauka, 2005, p. 75-93 ; Caroline Humphrey & Urgunge Onon, Shamans and Elders. Experience, Knowledge and Power among the Daur Mongols, Oxford, Clarendon Press, 1996.
  1. Marina Monguš, Istorija buddizma v Tuve [Histoire du bouddhisme à Touva], Novossibirsk, Nauka, 2001, p. 68-81 ; Aleksej Pozdneev, Oerki byta K SENIA PIMENOVA324

 

  1. Voir buddijskix monastyrej i buddijskogo duxovenstva v Mongolii v svjazi s otnošenijami sego poslednego k narodu [Essais sur la vie des monastères et du clergé bouddhique en Mongolie et sur les relations du clergé à la population], Elista, Kalmyckoe Knižnoe Izdatel’stvo, 1993 [1887], p. 110 et passim

 

  1. Vera D’jakonova, « Tuvinskie šamany i ix socialnaja rol’ v obšestve [Chamanes touvas et leur rôle social] », in I. Vdovin (éd.), Problemy istorii obšestvennogo soznanija aborigenov Sibiri [Problèmes de l’histoire de la conscience sociale des autochtones de la Sibérie], L., 1981, p. 129-164 ; Vilmos Diószegi, Tracing Shamans in Siberia. The Story of an Ethnographical Research Expedition, Oosterhout, Anthropological Publications, 1968, p. 279 ; Sev’jan Vajnštejn, Mir koevnikov Centra Azii [Le Monde des nomades du centre de l’Asie], M.,Nauka,1991.

 

  1. Jack Goody, Pouvoirs et savoirs de l’écrit, trad. de l’anglais par Claire Maniez, Paris, La Dispute, 2007.

 

  1. Nous devons ce terme à D. Furman et K. Kaariajnen qui parlent du « consensus pro-orthodoxe » dans les régions à majorité russophone (Dmitrij Furman & Kimmo Kaariajnen, « Religioznost’ v Rossii v 1990-e gody » [Religiosité en Russie dans les années 1990], in D. Furman & K. Kaariajnen (éd.), Starye cerkvi, novye verujušie [Vieilles églises, nouveaux croyants], M. – SPb., Letnij Sad, 2000, p. 13). Mais le phénomène concerne également les régions à population musulmane ou bouddhiste.

 

  1. Ensemble avec le christianisme orthodoxe qui reste cependant à Touva la religion de la minorité russophone.

 

  1. Jean-Pierre Bastian, Françoise Champion & Kathy Rousselet, « La globalisation du religieux : diversité des questionnements et des enjeux », in Id., La Globalisation du religieux, Paris, L’Harmattan, 2001, p. 10-11

 

  1. Site officiel de la FSS : http://shamanism.org/fssinfo/index.html.

 

  1. Paul Ricœur, Temps et récit. Tome III. Le temps raconté, Paris, Seuil, 1985,
  2. 442.

 

  1. Mikhaïl Bakhtine, Esthétique de la création verbale, préf. de Tzvetan Todorov, trad. d’Alfreda Aucouturier, Paris, Gallimard, 1984, p. 265.

 

Slavica Occitania, Toulouse, 36, 2013, p. 317-333.

Les sources du savoir.